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Photo du rédacteurSandie Crayne

Le père-Noël en banquiseroute


Noël. La dinde, la bûche, des flocons sur les fenêtres et des étoiles sur les sapins. Le monde entier s’y prépare. On stock des victuailles, (au passage on laisse sa conscience écolo au placard en achetant trois blocs de foie gras), on gratte des cartes de vœux, on enguirlande le salon. Et on écrit sa liste. Pourtant celui à qui elle est destinée, celui sur qui tout le monde compte mais que personne ne remarque ne fera peut-être pas partie du décor cette année. Celui que Coca Cola a habillé de rouge et de blanc, et que Greenpeace révèle en clochard. Le père-Noël ne fait pas grève, ce n’est pas son genre. Non, le père-Noël est en faillite, dans l’incapacité de résoudre l’équation d’une population sans cesse grandissante (bientôt 7 milliards d’habitants), et d’un territoire en constant rétrécissement.

Couvert de dettes, il s’est retrouvé dans l’obligation de vendre ses parts de marché à Coca, qui est maintenant actionnaire majoritaire de l’entreprise Xmas. Le service Fusion et Acquisitions de la multinationale s’est dit « ravi que cette affaire soit enfin réglée, et que le père-Noël ait accepté de prendre une décision sensée ». De son côté, le père-Noël s’avoue « vaincu et à bout ». Il a précisé qu’il serait « insupportable de voir les rennes mâchouiller de l’avoine rance dans des enclos surpeuplés, ou les elfes se battre pour une soupe édulcorée dans la queue de l’Armée du Salut. Noël pousse à la consommation. C’est bon pour le marché. Ça assure le bonheur des enfants, ce qui fait le bonheur des parents ».

L’entreprise Xmas loue donc désormais sa terre et sa capacité industrielle au père-Noël en tant que co-signataire. Cette solution temporaire devrait lui permettre de faire face à la demande jusqu’en 2020, date à laquelle son contrat devra être renégocié. Cependant les coupes budgétaires nécessaires à cette fusion ont eu pour conséquence la délocalisation de sa logistique de livraison. D’autre part, la fonte des glaces plonge les elfes dans le désarroi et les oblige à quémander le statut de réfugié climatique. C’est donc à contrecœur que Xmas est en négociation pour la sous-traitance de sa main d’oeuvre de fabrication dans des pays connus pour leur tarifs imbattables, et ce dès l’année prochaine.

Est-ce vraiment étonnant? Pouvait-on réellement espérer que la magie divertissante de Noël échappe à la crise qui fouette le monde ces dernières années? Oh (oh-oh) on peut y croire encore un peu si vous voulez. Tout comme on a cru au père-Noël. On enfile des œillères, et on fonce tête baissée vers la joie et l’allégresse des « fêtes », histoire de pouvoir étaler notre caviar sur un toast sans arrière pensée.


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